Depuis le début de l’année 2021, la question du retour de l’inflation a resurgi, conséquence de l’annonce du plan de relance américain et du rebond des prix des matières premières, en particulier du pétrole. Parallèlement, les taux d’inflation se sont redressés aux Etats‑Unis et en Europe après leur point bas enregistré en 2020 (liés à la crise sanitaire). Dans la zone euro, le taux d’inflation a significativement augmenté sur les trois premiers mois de l’année, atteignant 1,3 % en mars après – 0,3 % en décembre 2020. Cette hausse, principalement imputable à des effets de base, doit être nuancée et constitue plus une normalisation, après la forte baisse enregistrée en 2020, qu’une réelle poussée inflationniste. Plusieurs facteurs particuliers expliquent ce rebond : la remontée de la TVA allemande, l’introduction d’une nouvelle taxe carbone en Allemagne, la hausse du prix du pétrole et la modification des pondérations du panier de biens et services pour prendre en compte les changements de consommation de 2020. Le taux d’inflation de la zone euro devrait continuer à progresser dans les mois qui viennent et pourrait dépasser 2 % en fin d’année avec la persistance d’effets de base.
Toutefois, malgré des prix des matières premières en hausse, le taux d’inflation de la zone euro devrait se tasser en 2022 avec la disparition des effets de base haussiers et une situation macroéconomique toujours affaiblie. Il ne faut donc pas s’attendre au retour d’une inflation élevée auto‑entretenue dans la zone euro à court terme. Aux Etats‑Unis, en revanche, étant donnée l’ampleur de la stimulation budgétaire, le scénario du retour d’une inflation plus élevée est loin d’être exclu.
Si le risque inflationniste semble mesuré à court terme, le développement progressif de plusieurs tendances structurantes pourrait conduire à un régime d’inflation plus élevé à moyen terme que celui qui a prévalu au cours de la dernière décennie.
1/ La poursuite de la conduite de politiques budgétaires très expansionnistes financées par création monétaire, outre son effet sur les prix des actifs, pourrait conduire à une situation de « surchauffe » économique à l’origine de tensions sur les salaires et les prix. Ce facteur semble plutôt se développer aux Etats‑Unis, beaucoup moins en Europe.
2/ L’impact du vieillissement démographique sur l’inflation n’est pas trivial. L’affaiblissement des gains de productivité, et en corollaire des salaires et des prix, est souvent mis en avant. Cependant, le vieillissement démographique mondial (Chine) va entraîner une réduction de la main d’œuvre disponible et potentiellement conduire à une hausse des salaires qui pourrait mettre fin à la période de forte désinflation mondiale favorisée par l’entrée de la Chine dans l’OMC.
3/ De plus, le tassement de la mondialisation pourrait continuer, avec la volonté des trois grandes zones économiques de renforcer leur autonomie stratégique dans plusieurs secteurs mais aussi de lutter contre le changement climatique. Cela devrait conduire à une re‑régionalisation des chaînes de valeur impliquant une hausse des coûts de production.
4/ La transition écologique et énergétique va nécessiter une forte hausse du prix du carbone si les pays veulent se conformer à leurs objectifs de réduction de CO2 impliquant une hausse des coûts au moins dans la première phase.
5/ Le partage de la valeur ajoutée qui a été très favorable aux entreprises pourrait se déformer en faveur des salariés avec la volonté des gouvernements de réduire les inégalités.
6/ Face à la montée de la Chine et la dominance des Etats‑Unis dans les secteurs technologiques, la doctrine européenne de favoriser au maximum les politiques de concurrence pourrait évoluer réduisant leur effet désinflationniste.
7/ Face à une Europe affaiblie, l’Allemagne pourrait adopter une politique moins tournée vers la compression des coûts que par le passé.
Pour aller plus loin …
Consulter les autres articles “Marchés financiers”
Document publicitaire sans valeur contractuelle
Les informations présentées se fondent sur la réglementation en vigueur au 20/05/2021. Elles ne constituent pas un conseil ou un avis fiscal ou juridique.